Un couple aux manettes, pour un nouveau départ. Catherine Vampouille et Benoît Besnault, tous deux âgés de 49 ans, viennent de reprendre la célèbre chapellerie Crambes (chapeaux et casquettes), auprès de Thierry Fresquet, 65 ans, dans le cadre du départ à la retraite de ce dernier.
L’ancien gérant ne faisait pas mystère de sa volonté de vendre. Ce, dans un contexte difficile pour l’entreprise.
Un nouveau souffle
Depuis la reprise, le 15 avril 2019, les repreneurs ont fixé comme objectif prioritaire de « pérenniser l’activité à Caussade, sans internationalisation de la fabrication », insiste Benoît Besnault.
Plusieurs chantiers sont lancés : relance d’une collection pour femmes, suivi des tendances de la mode et du prêt-à-porter, développement de la marque Crambes en Asie et en Amérique du Nord, « où les marchés sont porteurs, et en attente d’une entreprise ayant une histoire à raconter », investissement dans un logiciel « pour mieux maîtriser la chaîne de l’achat des matières premières à la livraison des produits finis », renouvellement du parc informatique… Autre réflexion : la création d’un magasin d’usine.
Une façon efficace de mettre en valeur les chapeaux en tissu, feutres ou autres coiffes de paille qui font la réputation de l’enseigne dans le monde entier.
Une aide déterminante de la Région
La Région Occitanie a accompagné le projet grâce au dispositif transmission-reprise à hauteur de 50.000 euros. Une aide précieuse, « qui nous a permis d’entamer rapidement nos projets, alors que l’entreprise n’était pas en forme ». Concrètement, une thermocolleuse a été acquise pour 42.000 euros. Une opération « impossible sans cette aide de la Région Occitanie ». Et devenue indispensable : « L’ancienne machine datait du début des années 80. Elle avait fait son temps, présentait beaucoup de rebuts. Pour des marques de luxe, on ne peut pas se permettre de ne pas présenter une qualité optimale. »
D’autres investissements sont prévus, pour l’acquisition d’une brodeuse, d’une étiqueteuse et de nouvelles machines à coudre. Côté communication, la refonte du site web (avec lancement d’une activité e-commerce), de l’identité visuelle de la marque et de la charte graphique a été confiée à une agence locale.
L’investissement global s’élève à 200.000 euros. Avec l’objectif de revenir à l’équilibre dès 2020.
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Un accueil positif par les salariés
Passée une période de crainte, relative au changement, la reprise a été bien accueillie par les salariés. Les nouveaux propriétaires ont pris soin de leurs équipes. Une salle de pause a par exemple été inaugurée.
« On a marqué la reprise en buvant du champagne , s’amuse Catherine Vampouille.
Plus sérieusement, notre stratégie avait été exposée collectivement, avant même la signature de l’acte. C’est enthousiasmant d’emmener les salariés dans ce projet, de donner du sens. Ils en manquaient cruellement. Ils ne savaient plus pourquoi ils produisaient, et ne se rendaient plus compte qu’ils étaient capables de produire des chapeaux que l’on retrouve sur la tête de stars de cinéma ! Personne n’en parlait. Nous allons travailler à partager les informations. Nous les réunissons pour annoncer les bonnes nouvelles, les lancements, les nouveaux clients… » Deux audits de clients, dont un audit social, avec des interviews de salariés, « montrent que les gens sont contents de ce changement. Ils sentent une dynamique, et ce que l’on met en oeuvre va dans le sens de ce qu’ils attendaient. »
Crambes, un gage de qualité
Crambes réalise 3,6 millions d’euros de chiffres d’affaires et emploie 40 salariés. L’activité est multiple : production et commercialisation pour des chapelleries, des magasins de vêtements et des forains ; Fabrication à façon pour les grandes marques de luxe (Hermès, Lacoste, Louis Vuitton, Céline…) ; Négoce de produits achetés en gros en Europe et distribués à travers une gamme plus large. 8 % de l’activité est réalisée à l’international : Japon, Corée du Sud, Europe et Amérique du Nord. La PME produit chaque année entre 80.000 et 100.000 unités par an, principalement des chapeaux.
Les flux sont manuels (pas de grande série). L’atelier couture comprend un parc de 30 machines et emploie 17 personnes. Le prix de la qualité.
À retenir
La Région Occitanie a accompagné le projet à hauteur de 50.000 euros. Une aide précieuse, qui a permis par exemple l’acquisition une nouvelle thermocolleuse, pour 42.000 euros.
Les coulisses de la reprise
« C’est ma 2e reprise d’entreprise, rembobine Catherine Vampouille. J’ai utilisé les réseaux connus pour identifier Crambes : les bourses à l’entreprise sur le site du Fisac et de la Bpi, le réseau CRA (cédants et repreneurs d’affaires)… Nous avons mis en place des alertes sur ces sites, avec nos critères : un certain volume d’affaires, autour de 4 millions d’euros, la volonté d’être conjointement aux commandes, une implantation de préférence dans le Sud et une entreprise qui produise, et non pas positionnée sur des prestations.
Crambes correspondait à l’ensemble de nos critères. Le savoir-faire nous plaisait. Le marché du chapeau est une niche, qui se porte plutôt bien. Nous avons pris contact avec Thierry Fresquet, et nous nous sommes rencontrés sur le salon Made In France à Paris. Il fallait que le courant passe : il est bel et bien passé ! »
Lorsqu’ils sont venus visiter l’entreprise, les repreneurs ont le coup de coeur. Il y a eu une phase de négociation. Le cédant met beaucoup d’affectif dans la cession de son ‘bébé’… alors que l’acquéreur regarde surtout les comptes. « Mais on s’est mis d’accord assez rapidement. L’accord des banques a, lui, été plus difficile à obtenir, car l’entreprise perdait de l’argent. ‘Il n’y est pas arrivé, pourquoi y arriveriez-vous ?’, ai-je souvent entendu.
Nous remercions le cédant de nous avoir laissé entrer plusieurs fois dans l’entreprise, avant la signature. Nous avons pu ainsi identifier de façon fine l’état précis et les axes de progrès, développer une vision de ce que nous voulions faire et apporter des arguments précis aux partenaires financiers. Thierry Fresquet a aussi accepté de baisser le prix. En fait, les deux parties souhaitaient que l’affaire se fasse », conclut Catherine Vampouille.
Des repreneurs solides
Pour le couple de repreneurs, ce n’est pas une première aventure entrepreneuriale. Catherine Vampouille, ingénieure de formation, a déjà repris, entre 2009 et 2017, une TPE (9 salariés) de Montbéliard, fabriquant des ressorts et des pièces en fil métallique. « Mon père avait son affaire. Après 14 ans chez PSA, à Sochaux, où je me suis occupée des process et des études, j’ai eu envie de voler de mes propres ailes », explique-t-elle.
Benoît Besnault dispose, lui, de 20 ans d’expérience chez PSA, puis chez le groupe américain TRW, racheté par l’Allemand ZF. Une solide expérience à l’international, pour ce titulaire d’un doctorat en biomécanique (Arts et Métiers) et d’une agrégation en mécanique (Normale Sup).
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