Avec 730 entreprises, réalisant 6,7 milliards d’euros de chiffre d’affaire et employant quelque 25.000 salariés, la filière santé pèse en Occitanie. Et ne compte pas s’arrêter là. La Région Occitanie affiche son cap politique en matière de santé : offrir des soins accessibles à tous, avec un centre de soins à moins de 15 minutes de tous les habitants. Autre objectif poursuivi, reconquérir une souveraineté sanitaire comme en atteste la future usine de paracétamol à Toulouse, la première en Europe. Porté par la start-up Ipsophène, le projet a reçu un soutien de plus de 4 M€, en 2023, de la Région Occitanie.
Trois CHU (Montpellier, Nîmes et Toulouse), 300 maisons de santé, 60 centres de recherches, Biopôle Euromédecine (campus regroupant 26 entreprises de la santé), French Healthcare Association (promotion du savoir-faire français en santé à l’international), pôle de compétitivité Eurobiomed, Institut de formation aux métiers de la Santé (Carcassonne)… Avec un écosystème complet, l’Occitanie favorise l’émergence d’entreprises innovantes sur le territoire dans les domaines tels que le diagnostic, la bio-production, les dispositifs médicaux ou encore la robotique.
Montpellier, pôle d’excellence en santé globale
Cette dynamique en matière de santé est renforcée par des initiatives telle que « Med Vallée », stratégie de développement économique et d’aménagement du territoire lancée en 2021 et pilotée par Montpellier Métropole Méditerranée. L’objectif ? Devenir un pôle d’excellence mondial en santé globale. « Montpellier offre un terreau fertile pour l’innovation, grâce à un environnement universitaire et médical de premier plan, avec des structures telles que le CHU et l’Institut du Cancer de Montpellier », assure Alexandre Salvador, directeur général d’Intrasense (logiciels d’imagerie médicale). Le CHU de Montpellier mobilise 740 millions d’euros pour se moderniser. La capitale héraultaise accueille par ailleurs Futurapolis Santé, les 11 et 12 octobre à l’Opéra Comédie de Montpellier avec comme fil rouge l’intelligence artificielle.
Par ailleurs, l’Occitanie a un temps d’avance en termes de robotique médicale et chirurgicale. Montpellier s’affirme en la matière comme un pôle d’excellence international, avec Quantum Surgical, créé par l’emblématique Bertin Nahum qui affiche désormais des ambitions sur le marché américain, ou encore Zimmer Biomet. Sur cette thématique est organisée une journée, le 9 octobre à la Cité de l’Économie et des Métiers de Demain.
Lutte contre le cancer
En matière d’oncologie, l’Occitanie se démarque également. Avec des actualités récentes. Le 26 septembre, la chaire Oncobreast a été créée par la Fondation Toulouse Cancer Santé, Total Énergies, l’Inserm et l’IUCT-Oncopole. Dotée d’une enveloppe de 2 millions d’euros, cette chaire est consacrée à l’étude du cancer du sein triple négatif, l’une des formes les plus agressives de cette maladie qui concerne 15 % des femmes ayant un cancer du sein (9.000 personnes par an).
L’Institut du Cancer de Montpellier (ICM) consacre, le 16 octobre, une journée à la présentation et à la démonstration du robot Mirokaï d’Enchanted Tools, entreprise de robotique parisienne. Les équipes de l’ICM ont imaginé un parcours de soin en radiothérapie pédiatrique grâce à l’intégration d’un robot compagnon, mobile et autonome. Ce projet se distingue par une approche centrée sur le patient, en utilisant la technologie robotique. Celle-ci contribue à une atmosphère rassurante et moins stressante pour les enfants et leurs familles à chaque étape du parcours de soins, et notamment pendant les séances de radiothérapie.
Les CHU de Toulouse et Montpellier se projettent dans le 21e siècle
Autre actualité, le CHU de Toulouse met en place un projet d’établissement 2023-2028 chiffré à 550 millions d’euros. Parmi les projets phares : « la construction du Grand hôpital régional des enfants sur le site Purpan d’ici 2031, le projet de Nouvel Hôpital à Rangueil afin de réunir les activités de Rangueil et Larrey à horizon 2027, l’extension de l’Oncopole, la transformation numérique pour simplifier la vie des patients et le travail des professionnels… », expose le CHU de Toulouse.
À Montpellier aussi le CHU se dote d’un projet d’établissement 2023-2027, quant à lui chiffré à 740 millions d’euros. Le projet d’extension du CHU de Montpellier vise à moderniser et agrandir ses infrastructures pour répondre aux besoins croissants en soins. Il inclut la construction de nouveaux bâtiments, comme un centre de chirurgie ambulatoire et un pôle mère-enfant, ainsi que l’amélioration des équipements médicaux avec l’ajout de scanners et d’IRM de dernière génération. Il comprend également la création de services spécialisés, tels qu’une unité dédiée aux maladies rares et un centre de rééducation.
Deux IHU créés
L’Occitanie se sera dotée, courant 2024, de deux IHU (Institut hospitalo-universitaire). En avril, a été lancé à Toulouse l’IHU HealthAge, porté par l’Inserm, le CHU de Toulouse et l’Université Toulouse III – Paul Sabatier. Unique IHU en France exclusivement dédié au vieillissement, le consortium toulousain entend « améliorer la prévention et la prise en charge des maladies liées à l’âge, développer de nouveaux médicaments, accompagner les personnes âgées et favoriser le déploiement d’infrastructures adaptées », pose l’Inserm.
En septembre, c’est l’IHU montpelliérain Immun 4 Cure qui a vu le jour à Montpellier. Porté par le CHU de Montpellier, l’Inserm et l’Université de Montpellier, il s’agit d’un institut consacré aux maladies auto-immunes systémiques.
Partenaire des deux IHU, la Région Occitanie affirme que « les attentes des citoyens et des professionnels sur la santé sont très fortes. Pour atteindre ces objectifs, nous misons sur le collectif. En créant des ponts entre la recherche et les entreprises, leurs travaux sont essentiels pour renforcer notre capacité à offrir des soins adaptés à tous les patients ».
L’IA va révolutionner le secteur des soins
Cotée sur Euronext Paris et spécialisée dans la conception de logiciels en imagerie médicale, Intrasense (Montpellier, 70 salariés) facilite le traitement et l’analyse des imageries médicales par les radiologues. En 2023, la société ouvre son capital à Guerbet, renforçant sa capacité à intégrer des solutions d’IA dans ses outils. L’IA ouvre la voie à une analyse automatisée de l’évolution de scanners de suivi de cancers, avec l’identification et la mesure de nouvelles lésions. Concrètement, l’IA aide le radiologue à établir un diagnostic fiable, et le dispense des tâches répétitives pour qu’il se concentre sur des cas plus complexes. Parmi les nouveautés 2024 chez Intrasense, le déploiement de Liflow, plateforme de suivi intelligente d’aide au diagnostic et au suivi des patients atteints de cancer. « Cette technologie a pour objectif de réduire de moitié le temps d’interprétation des examens radiologiques complexes, d’améliorer la précision des diagnostics et d’aider les radiologues dans leurs tâches répétitives », se félicite Alexandre Salvador.
Pierre Fabre, le poids lourd
Côté entreprise, c’est sûrement le médaillé d’or de la santé d’Occitanie. Basés à Castres, les laboratoires pharmaceutiques et dermo-cosmétiques Pierre Fabre (10.000 collaborateurs, 2,83 milliards d’euros de chiffre d’affaires) se développent avec la construction d’une nouvelle plateforme logistique à Muret (31), pour un investissement de 70 millions d’euros. « Située sur le futur parc d’activité Clément-Ader, la plateforme prendra place sur une parcelle de 20 hectares, dans un bâtiment de 73.000 m² », détaille le groupe. Elle accueillera la totalité des collaborateurs opérant aujourd’hui sur deux sites existants. Coup d’envoi des travaux en 2026 pour une livraison début 2028.
Les pépites explorent la santé de demain
La santé, c’est aussi de nombreuses pépites qui ont bouclé des levées de fonds récemment : la société biopharmaceutique MedinCell (21,5 millions d’euros, Jacou – 34) ; Sensorion (35 millions d’euros, Montpellier), spécialisée dans les thérapies innovantes pour lutter contre les pertes d’audition ; X-Pressure (4,5 millions d’euros, Toulouse) pour identifier les cas d’hydrocéphalie, Sêmeia (8 millions d’euros, Toulouse), spécialisée dans la télésurveillance médicale… Et ce n’est pas fini : Cilcare (thérapies pour les troubles de l’oreille interne, Montpellier) cherche à lever 15 millions d’euros. Cette biotech développe une solution visant à réparer l’audition via une seule administration transtympanique indolore.
Ne pas rater le train de l’IA
La Région vient d’adopter un plan de développement de l’IA doté de 55 millions d’euros afin d’accompagner le déploiement de l’IA dans l’économie régionale. Cette mesure s’appuie sur les 250 entreprises (3.500 salariés) du numérique du territoire spécialisées en IA. Les applications dans le domaine de la santé permettront de mieux diagnostiquer les pathologies, d’adapter les traitements, d’augmenter la productivité, d’assister les chirurgiens dans le bloc opératoire et, aussi, de lutter contre les difficultés de recrutements. « Certains ont peur de l’IA. Mais elle ne va pas remplacer les professionnels de santé, c’est avant tout un outil d’aide au quotidien, témoigne Alexandre Salvador. Elle fait gagner en productivité et peut permettre d’éviter des erreurs. Nous pouvons la voir comme un filet de sauvetage. » L’IA est enfin aussi un formidable moyen d’accompagner les téléconsultations ou les opérations à distance : à ce titre, elle contribuera à son échelle à la lutte contre les déserts médicaux.
Lutte contre les déserts médicaux
Alors que près de 80 % de l’Occitanie est en zone en tension en termes d’accès aux soins selon l’ARS, la Région déploie en 2022 sont dispositif « Ma santé, Ma Région », qui consiste à employer des médecins salariés. Depuis le lancement, 75 médecins généralistes ont été recruté à travers 15 centres, et y effectuent entre 11.000 et 12.000 consultations par mois, avec des visites à domicile et des gardes. Objectifs : recruter 200 professionnels de santé d’ici 2028 et ouvrir 10 centres par an.
Jean-Pierre Boffy, ambassadeur de la filière santé à l’export
PDG de Steam France (Montpellier, solutions de protections individuelles, désinfection et stérilisation pour les établissements médicaux, laboratoires et industries, 98 salariés), Jean-Pierre Boffy est le nouveau président de French Healthcare Association. Cette association permet aux industriels, organisations professionnelles, établissements de santé, et instituts de recherche et de formation français de promouvoir leur savoir-faire à l’international. « L’image de la filière santé française est excellente à l’internationale ! Il faut en prendre conscience », lance-t-il. Y compris en Occitanie : seules 10 membres de French HealthCare Association sont basés dans la région, sur un total de 300 au niveau national. « On doit mieux faire », sourit-il.