Elle nous reçoit dans son bureau de la caserne Lepic en plein coeur de Montpellier. Sur un mur, un fanion rouge et vert, les couleurs de la légion étrangère. Son frère sert comme officier au 1er régiment étranger. Sur l’autre mur, un portrait discret du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, abattu par un terroriste en 2018 après avoir pris la place d’un otage dans le supermarché de Trèbes (Aude). « C’était un camarade de promotion à l’école des officier de la gendarmerie de Melun », confie-t-elle.
Issue d’une famille de militaire, Danièle Goury est rentrée dans la gendarmerie en 1990, au bas de l’échelle. Un à un, elle a gravi tous les échelons jusqu’au grade de lieutenant-colonelle (la gendarmerie compte moins de 10 % d’officier féminin).
Aujourd’hui, elle occupe les fonctions de Chef du bureau sécurité publique et partenariat au sein de la gendarmerie départementale de l’Hérault. Elle est chargée notamment du plan de formation mis en place en interne pour améliorer la prise en charge des femmes victimes de violences. Dans le cadre des violences conjugales, 86 % des victimes sont des femmes. En moyenne, une victime va entreprendre sept démarches officielles avant d’avoir le courage de se séparer de son conjoint violent.
« Si on n’a pas les clés, on a parfois du mal à comprendre que la victime vienne nous demander de retirer la plainte qu’elle a déposé deux jours auparavant », explique Danièle Goury. La formation qu’elle pilote depuis octobre est basée sur la psychologie.
L’objectif est de permettre aux gendarmes de comprendre les phases d’incertitude et le processus de réflexion de la victime. « Il y a 30 ans, on interpelait les auteurs et c’était tout. Aujourd’hui, les victimes ont des droits et nous leur devons la meilleure prise en charge possible, basée sur l’écoute et la bienveillance. C’est une avancée extraordinaire », se félicite celle qui a reçu la légion d’honneur en 2019.
Mariée (à un officier de gendarmerie), mère d’une ado, elle avait 20 ans quand elle a revêtu l’uniforme. A la question « pourquoi la gendarmerie ? », elle répond spontanément « parce que j’avais envie de faire des enquêtes, j’étais fan de séries policières. Et puis aussi, je voulais me rendre utile ». Pour Danièle Goury, « ce n’est pas compliqué d’être une femme en gendarmerie, d’ailleurs, il y en a de plus en plus ».
Elle fait partie aujourd’hui du cercle très fermé des officiers supérieurs féminins de la gendarmerie nationale. « Une femme sera peut-être plus à l’écoute des personnels placés sous ses ordres. En tant qu’officier, je dois écouter mes subordonnés mais à la fin, c’est moi qui décide », sourit-elle. Elle reconnait que son métier n’est pas rose tous les jours. Elle a été confrontée à des enquêtes difficiles, des scènes de crime qui l’ont marqué, des infanticides… Cependant, elle adore le côté relationnel du métier. « Être au contact de la population, partager, écouter, apprendre des autres, c’est très enrichissant et ça fait grandir »
Et puis, il y a aussi les bons moments, les moments forts : les mercis d’une famille quand on retrouve un enfant, par exemple. « Et ça, ça vaut toutes les médailles du monde. »
Le numéro pour les femmes victimes de violence
Chantage, humiliation, injures, coups, violences sexuelles… Les femmes victimes peuvent contacter le 3919. Gratuit et anonyme, ce numéro est accessible de 9 à 19 heures du lundi au samedi. Il oriente vers des dispositifs d’accompagnement et de prise en charge mais n’est pas un numéro d’urgence comme le 17 qui permet, en cas de danger immédiat, de téléphoner à la police ou la gendarmerie.