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E2C : quand l’école donne une seconde chance

En Occitanie, onze Ecoles de la 2e chance accueillent chaque année un peu plus de 1 300 jeunes sortis du système scolaire sans diplôme ni qualification. Objectif : retrouver le chemin de la formation et de l’emploi.

Offrir un nouveau départ aux jeunes « décrocheurs » de 16 à 26, voire 29 ans : c’est la mission des Écoles de la deuxième chance (E2C) que la Région soutient avec l’appui du Fonds Social Européen. Onze [1] existent déjà et quatre E2C devraient être créées d’ici les six années à venir.

Ces écoles ont été mises sur pied en 2003 pour permettre à ces jeunes de se construire un projet professionnel. Notre devoir est de leur tendre la main et de les accompagner vers la réussite, insiste Marie Castro, vice-présidente en charge de la formation professionnelle à la Région Occitanie.

L'Occitanie comptera bientôt 15 écoles de la 2ème chanceChaque année, la Région Occitanie consacre près de 10 millions d’euros à ce dispositif qui a largement fait ses preuves. Cet investissement représente jusqu’à 70% des budgets des écoles, soit deux fois plus que dans les autres régions de France. La particularité de ces établissements repose sur un accompagnement personnalisé (de quatre à douze mois), une formation gratuite et rémunérée (500 € en moyenne) et la découverte de métiers avec des stages en entreprises.

Aucun emploi du temps ne se ressemble : la formation est « sur-mesure » en fonction du projet professionnel. « Rester cinq heures d’affilée en cours comme à l’école, ce n’est pas pour eux. Nous définissons ensemble un projet, les aidons dans leur démarche, travaillons sur leur autonomie. Nous prêtons aussi beaucoup d’attention à leur personne, leurs difficultés et l’estime de soi. La prise en charge est vraiment globale », témoigne Hélène Tardy, coordinatrice à l’E2C de Perpignan.

« Les portes s’ouvrent de nouveau », Philippe Balcou, 19 ans – Perpignan :

« J’ai complètement décroché », confie Philippe d’une voix fluette. Victime de harcèlement scolaire, ce jeune Perpignanais a dû arrêter l’école au niveau CAP. «  J’étais détruit, je me disais que tout était fini pour moi, j’ai touché le fond », poursuit-il pudiquement. S’en suit alors une année entière à rester cloîtré dans sa chambre à jouer aux jeux vidéo.

Le déclic finit par venir de sa grande sœur qui lui conseille de rencontrer la Mission Locale des Jeunes. Là, une conseillère lui parle de l’Ecole de la deuxième chance. « C’est comme si les portes s’ouvraient de nouveau pour moi. Je vais recommencer tout ce que j’ai échoué. » Le test d’entrée réussi en juillet dernier, tout s’est enchaîné très vite avec des stages et le début de sa formation à l’E2C de Perpignan. Philippe sait maintenant qu’il veut être menuisier ; il a quelques mois devant lui pour combler ses « lacunes » et pour, une fois « confiant », y arriver.

Alternance et découverte d’un métier à la clé

Le concept s’appuie sur le principe de l’alternance grâce à des partenariats avec les entreprises du territoire, dans lesquelles les stagiaires passent 40% de leur temps afin de leur permettre de découvrir et d’expérimenter un nouveau métier. Les modules d’apprentissage, quant à eux, se basent sur des remises à niveau (mathématiques, français), du renforcement de savoirs, des projets collectifs et des techniques de recherche d’emploi (élaboration de CV, simulation d’entretiens d’embauches…).

Mais ce n’est pas tout. Au sein de ces écoles, la Région lutte contre la fracture numérique (don d’un ordinateur, enseignement par « escape game », recours à la réalité augmentée…), la précarité alimentaire (gratuité des repas du midi) ou encore la radicalisation et la désinformation sur les réseaux sociaux (intervention d’« Esprit’Critk » avec le Club de la Presse Occitanie).

A leur sortie, 65 % des élèves accèdent à une formation qualifiante ou à un emploi.

C’est ainsi que Lamine Koumbassa, 21 ans, part en stage ce mois d’octobre dans l’entreprise de fonderie Ermes à Colomiers, près de Toulouse. Le directeur de l’E2C de Toulouse, Marc Martin dit de lui qu’il « a pris tout ce que l’école pouvait lui donner pour en faire son miel ». Ce jeune Guinéen, qui a dû fuir son pays par la Libye, se verrait bien désormais apprenti soudeur, mais il rêve aussi « d’avoir une famille et d’être utile pour rendre tout ce qu’on m’a donné… ».

« On les prend comme ils sont ! », Marc Martin, Directeur de l’Ecole de la 2e chance de Toulouse :

« Après 18 ans à la tête de cette école, j’ai l’intime conviction que si la motivation est là et que la confiance est installée, pas grand-chose peut arrêter nos jeunes. On leur dit « venez comme vous êtes ». Il faut juste avoir envie de s’en sortir . Des moyens importants sont mis en place, avec une méthode pédagogique éprouvée. Pendant ces quelques mois de formation, on assiste à une véritable « renaissance ». Je ne parle pas d’eux comme des « stagiaires » mais comme des « élèves » pour nourrir leur sentiment de revanche sur le système scolaire. Souvent ils nous disent : « l’école m’a détruit, et je me suis reconstruit à l’école de la deuxième chance ».

[1Une à Toulouse, Montpellier, Nîmes, Alès, Béziers, Perpignan, Carcassonne, Narbonne, Lunel et Onet-le-Château.